Créé le 04-09-2012 à 16h35 –Par Boris Manenti
Le gouvernement allemand a adopté un projet de loi qui
contraindrait l'Américain à rémunérer les éditeurs de presse. Un projet qui
inspire en France.
Google et son volet d'informations Google
Actualités sont dans le viseur du gouvernement allemand. Le conseil des
ministres a adopté un projet de loi qui contraindrait le géant américain du web
à verser une rémunération aux journalistes et aux éditeurs de presse dont les
contenus sont reproduits sur Google Actualités ou sur des flux RSS. La ministre
fédérale de la Justice, Sabine Leutheusser-Schnarrenberger, a expliqué vouloir
"mieux protéger les éditeurs de presse sur Internet".
Surnommé "Lex Google", ce projet de loi a été
initié la fédération des éditeurs de journaux allemands qui regroupe des grands
noms de la presse comme Axel Springer ou Bertelsmann. «Les moteurs de
recherche piratent les contenus en publiant des extraits et ils ne demandent
pas l'autorisation, ils les prennent, simplement», lance le porte-parole de la fédération.
"Les éditeurs se désolent que Google publie leurs contenus sans partager
les recettes publicitaires."
Après la validation du gouvernement, le quotidien "Bild" s'est félicité : «C'est un bon
jour pour tous les lecteurs, journalistes et éditeurs de presse. Google et les
autres moteurs de recherche captent des textes, qui sont le fruit d'un dur
travail de recherche et écrits avec professionnalisme, et les postent sur
internet.»
Le texte doit désormais passer devant le Bundestag, la
chambre basse du Parlement.
Google réplique
Mais ce projet de loi n'est pas du goût de tous. A
commencer par Google. "S'il est adopté, ce projet de loi limiterait
drastiquement l'accès à l'information en ligne pour les internautes allemands,
[et] générerait des incertitudes juridiques et des coûts plus élevés pour
tous", réagit un porte-parole de Google Allemagne. "Il appartient désormais au
Parlement allemand de faire en sorte que ce projet ne devienne pas une
loi."
La "Lex Google" ne fait qu'intensifier
"l'insécurité juridique" pour tous les acteurs, estime l'association
Digitale Gesellschaft (Société numérique) citée par "le Point". «Si le modèle économique des éditeurs
en ligne n'est plus tenable, on ne peut pas décréter une telle subvention du
secteur privé vers le secteur privé», ajoute-t-elle. Même son de cloche du côté des partis
d'opposition (sociaux-démocrates du SPD, Verts et Parti pirate) qui appellent
au rejet du texte au Parlement.
Si le projet de loi était adopté définitivement, les conséquences
pourraient être sans précédent, estiment les détracteurs. Selon Bernhard
Rohleder, directeur de la fédération allemande des professionnels de
l'informatique, la loi causerait la mort de tous les acteurs du web incapables
de rétribuer les éditeurs de presse.
Une éventuelle rétribution des entreprises de presse par
des portails d'actualités tels que Google Actualités impliquerait "une dépendance
accrue des journalistes envers les géants du web" posant des questions de
déontologie, remarque "le Point".
Vers une adaptation en France ?
Un projet de loi similaire avait déjà été présenté en
Belgique. Google avait alors menacé de purement et simplement déréférencer
(supprimer des résultats de recherche) les sites d'informations de son moteur.
Une menace efficace puisque le trafic des sites web est largement généré par
Google. "Google Actualités peut générer entre 20 et 30% du trafic de
certains sites", croit savoir "la Tribune".
Une menace similaire pourrait-elle être lancée en Allemagne
? Rien n'est moins sûr. Mais certains vont déjà jusqu'à imaginer que Google décide
de fermer son service d'actualités en Allemagne.
Le projet de loi fait déjà des émules en France. Le Syndicat de la
presse quotidienne nationale (SPQN) aurait déjà transmis deux ébauches de texte
aux cabinets de la ministre de la Culture, Aurélie Filippetti, et de la
ministre de l'Economie numérique, Fleur Pellerin, affirme "le Monde". Le premier projet imagine la création
d'un "droit voisin" sur les portails d'informations qui permettrait à
la presse de se voir rémunérée pour l'utilisation de ses contenus. Le second
texte préconise la création d'une nouvelle taxe sur les ordinateurs et les
tablettes tactiles au profit de la presse.
Source : Le Nouvel Observateur